Lorsqu'on pénètre dans la distillerie de Monsieur Balthazar, on pourrait presque se croire... dans une boulangerie ! On y retrouve fréquemment les mêmes effluves, et notamment une délicieuse odeur de pain brioché. "C'est un peu comme si on humait les senteurs d'un sac d'orge", sourit David Faverot, le responsable du site. Des sensations olfactives qui rappellent, si besoin en était, que la fabrication du whisky est pleinement intégrée à l'univers céréalier. Elles soulignent aussi combien ici, le lien avec les productions de la terre est étroit.
Située dans la campagne bourbonnaise, à quelques kilomètres du bourg de Hérisson (Allier), la distillerie a en effet construit année après année son identité en travaillant les céréales locales. Le maïs, le malt d'orge et le seigle qui entrent dans la recette de ce whisky sont tous issus du centre de la France. De même, les fûts neufs utilisés pour faire vieillir la précieuse eau de vie proviennent des chênes de la forêt de Tronçais toute proche.
Cette volonté de "s'inscrire dans une identité locale" a été une constante pour le fondateur de la distillerie, Olivier Perrier. Acteur de théâtre et metteur en scène, il s'est pris de passion pour la fabrication du whisky au milieu des années 80 et a mené durant de nombreuses années recherches et expérimentations dans ses alambics pour mettre au point sa recette. En 2006, la commercialisation a débuté. Et aujourd'hui, la distillerie reprise par David Faverot en 2013 produit 8000 à 9000 bouteilles par an. Elle propose son whisky "made in France" dans sa petite boutique au cœur du village de Hérisson, comme à l'autre bout du monde. Car désormais, les productions de Monsieur Balthazar se savourent autant en Californie, à New York qu'à Shanghai, s'affichant fièrement sur les étals étrangers aux côtés des vénérables whiskys écossais, irlandais, américains ou japonais.
On a observé beaucoup de créations ces trois dernières années [...] La France compte désormais une quarantaine de distilleries de whisky.
"Une quarantaine de distilleries de whisky en France"
L'aventure observée dans l'Allier se décline aujourd'hui en différents endroits du territoire français. Un mouvement de fond traverse ainsi l'Hexagone : des distilleries s'y développent pour produire des whiskys tricolores pleins de personnalité, ancrés dans leur territoire. "On a observé beaucoup de créations ces trois dernières années, confirme David Faverot. La France compte désormais une quarantaine de distilleries de whisky".
Certaines naissent dans des brasseries ou des fabriques d'eau de vie de fruits, les responsables désirant élargir ou réorienter leur activité alors que des vents porteurs soufflent sur le whisky. D'autres sont le fruit d'une longue histoire et de beaucoup de passions, comme chez Monsieur Balthazar.Dans l'ancien corps de ferme transformé en distillerie, chaque étape de fabrication y est d'ailleurs aujourd'hui encore l'objet d'une attention particulière. C'est notamment le cas de la fermentation, qui intervient après le brassage. "C'est un moment clé, où le sucre de la céréale se transforme en alcool et où la palette aromatique se construit", explique David Faverot. Le choix des levures est notamment fondamental. "Elles constituent un véritable secret de distillerie", poursuit-il. La double distillation qui suit, tout comme le temps du vieillissement, sur plusieurs années, seront aussi observés de près. "Lorsque le whisky est dans les fûts, il faut le sentir régulièrement" indique le responsable de la distillerie.
Bientôt un whisky 100 % seigle
A force d'expérimentations, la recette du précieux breuvage bourbonnais s'est consolidée au fil des ans. Ce qui n'empêche pas David Faverot de mener toujours de nombreux tests derrière les murs de sa distillerie. En jouant sur les types de chauffe, de céréales ou de fûts, ou encore sur le choix des levures et leur proportion, il poursuit au quotidien le processus créatif qui caractérise cette nouvelle génération de fabriques à whisky.
Une nouvelle production est d'ailleurs en préparation chez Monsieur Balthazar. Les whiskys Hedgehog (« hérisson » en anglais), Tronçais (vieilli en fûts neufs) et Aumance (vieilli en anciens fûts de sauternes) vont être rejoints l'an prochain par un rye, actuellement en cours de vieillissement. Un whisky 100 % seigle qui célébrera bien évidemment lui aussi la production agricole locale et apportera sa touche à l'atmosphère pleine de senteurs céréalières de la distillerie bourbonnaise.