Entre râpe et passoire, cet objet permet de faire les spaetzle, petites pâtes copieuses, servies ensuite comme accompagnement ou comme plat unique. Les grands chefs proposent cette recette traditionnelle dans des restaurants étoilés. Mais on peut également les faire à la maison, il suffit de savoir manier cette planchette à trous et son racloir...
Le mot spaetzle signifie « moineaux ». C’est la forme des pâtes qui leur a donné ce surnom car elles ressemblent à un nid de branchettes fait par un petit oiseau. Et c’est justement pour que vos pâtes correspondent à leur nom, qu’il vous faudrait avoir un ustensile spécial, utilisé en Alsace (mais aussi en Allemagne) depuis des siècles.
Tout a commencé par une simple planche humide en bois
On découpait sur cette place des lanières de pâte à œuf et on les faisait glisser dans l’eau bouillante. Les Chinois ou encore les Russes utilisent toujours cette technique pour faire, les premiers – les nouilles « diaosiaomian »刀削麵 et les deuxièmes – « la lapcha ». Les Alsaciens appellent cette pratique ancestrale « méthode schaben ». Mais en Allemagne et en Alsace, l’ustensile a pris, petit à petit, une autre forme. Au dessus de votre casserole d’eau bouillante vous installez une sorte de passoire avec des trous. Vous mettez votre pâte et vous pressez. A travers les trous, la pâte tombera dans l’eau toute seule, il n’y a rien à couper. Elle ressortira de l’autre côté en forme de fines brindilles ou des ramilles un peu plus grosses. Leur largeur dépend de la taille des trous, bien évidemment, mais peu importe, l’essentiel étant que ce soit bon ! Et pour économiser les forces, les Alsaciens ont inventé une technique encore plus facile qui inclut l’utilisation d’un petit racloir, « méthode reiben ».
Si les trous sont vraiment très gros, les pâtes prennent un autre nom, elles vont s’appeler plutôt knepfle que spaetzle. Et pour les tout petits trous, les Alsaciens conseillent de faire une pâte un peu plus liquide, plus facile à passer. Mais si vous voulez vraiment garder la recette traditionnelle, il existe une autre forme d’ustensile à spaetzle, plus sophistiqué et qui permet d’utiliser une pâte plus compacte, plus riche. Cette planchette est vraiment plus proche de la râpe que de la « passoire », et elle est dotée non pas d’un simple racloir mais d’un racloir coulissant. Une fois les pâtes tombées de l’autre côté de la râpe au fond de la casserole, il suffit d’attendre quelques minutes pour qu’elles réapparaissent à la surface. C’est prêt, et vous pouvez maintenant vous servir d’une vraie passoire pour les égoutter.
Au restaurant ou chez soi
C’est encore une grande question que de savoir qui était vraiment à l’origine de cette invention nous diront les Allemands. Inutile de rentrer dans cette discussion épineuse, personne ne connaît la réponse, les spaetzle existent des deux côtés de la frontière, et on ne saurait même pas dire quand est-ce qu’ils sont apparus sur les tables locales.
Les grands chefs alsaciens chérissent la tradition et proposent les spaetzle aussi bien dans des brasseries que dans des restaurants étoilés. Marc Haeberlin décrit une recette dont l’exécution est tout à fait à la portée d’un simple mortel, dans son livre « La cuisine alsacienne : Les recettes de l'Auberge de l'Ill ». Et son restaurant qui a porté trois étoiles Michelin pendant 50 ans, présente également les spaetzle comme accompagnement aux noisettes de chevreuil avec les cèpes des Vosges et le confit de betteraves aux épices. Pascal Bastian, du Cheval blanc à Lembach les sert également, mais avec le lièvre « à la Royale », râpé de truffe fraîche et les chips de topinambour. Il existe même une version sucrée. Gilles Leininger, restaurant Jardin Secret à la Wantzenau, deux étoiles Michelin, les a fait poêlés au caramel beurre salé, avec des pommes confites façon tatin. Pourquoi pas ?
Mais les spaetzle juste au beurre et parsemés de chapelure sont aussi un délice.
Simple à faire, il faut juste utiliser cette étonnante râpe dont on connaît maintenant l’utilité !