Sur les hauteurs de la ville, un moulin à vent déploie ses ailes à voiles de 7 m. Vieux de presque quatre siècles, c’est le dernier moulin à vent de Castelnaudary autrefois surnommée « la ville des moulins à vent ».
Le moulin de Cugarel a gardé son mécanisme, son fer et son rouet intacts ; encore aujourd’hui, il pourrait produire trois sacs de farine de blé, d’avoine ou de maïs par heure. Le monument d’agriculture locale attire les touristes et suscite la fierté des habitants. Tout comme deux gourmandises, l’alléluia et le gloria, pour lesquels il a meulé le grain encore en 1920. Eux aussi témoignent de la richesse céréalière de la région de Laugrais.
Le passage à la pâtisserie Belloc est tout autant une attraction touristique. L’alléluia, ce biscuit sec ne se trouve qu’ici. L’origine de son nom incroyable n’est pas tout à fait définie, deux versions se disputent mais chacune est indéniablement liée à l’histoire de la ville.
Castelnaudary au four et au moulin
La première version dit que l’alleluia doit son apparition à la semaine sainte, surtout que la tradition persiste toujours. Il faut le manger accompagné d’un vin mousseux local ou tout simplement d’un thé, pendant la semaine de Pâques. Il paraît qu’à Castelnaudary, les enfants rentrant de l’église, chantaient « alléluia » tout en allant de maison en maison et recevaient en cadeau un petit gâteau. Le livre Cnac sur le patrimoine gastronomique du Languedoc cite le texte de Gaston Jourdanne de 1899 sur les coutumes de l’Aude et qui a conservé les paroles de cette chanson :
« Alleluia, alleluia ! Une fougassette comme cadeau. Qui n’en aura pas, n’en mangera pas ! Qui n’en mangera pas, s’en passera ! » |
L’autre version est plus romanesque. Il s’agirait d’une recette rapportée par un soldat de La Grande Armée qui logeant chez deux sœurs pâtissières à Castelnaudary, pour payer son hébergement, a confié le secret de la confection du biscuit. Comme d’ailleurs souvent dans l’histoire des pâtisseries françaises, on parle ici d’un mystère rapporté des pays lointains par un soldat de Napoléon Premier. C’est à évaluer l’impact que ces expéditions étrangères ont eu sur les coutumes gastronomiques régionales à l’époque quand l’armée ou la marine étaient, hélas, presque le seul moyen de voir le monde.
Ce brave soldat a bien récompensé l’hospitalité de ses hôtesses. Le gâteau a plu aux habitants de la ville. D’où l’a-t-il rapporté ? - l’histoire ne dit rien. Mais certainement pas des plaines enneigées de la Russie ou de la Pologne : l’alléluia est parfumé au cédrat, fruit de la Méditerranée. Le soldat, revenait-il de la campagne d’Italie ? En tous cas, si on croit à cette version, la recette n’avait pas encore de nom. Elle sera baptisée en 1814, avec la visite à Castelnaudary du pape Pie VII. Les habitants ont bien entendu offert au pontife ce qu’ils avaient de meilleurs, y compris donc le biscuit qui d’ailleurs pourrait très bien être mangé pendant le carême précédant Pâques. Les œufs qui rentraient dans sa composition étaient déjà considérés à cette époque comme maigres. Le pape s’est exclamé « alléluia ! » et le mot était dit.
Les ronds, les rectangulaires et les « huit »
Trois formes d’alléluia sont canoniques, la plus répandue étant une sorte d’éclair long et dodue recouvert d’une forte couche de glaçage. Il existe également des ronds et des biscuits en « huit », plus rares. Il est plus sympathique de se rendre à Castelnaudary et de les acheter dans l’ancienne pâtisserie avant de monter vers le moulin.
Cuisine d'ici et d'ISCA |
Mais il est assez facile de les confectionner dans sa propre cuisine. Il suffit de mélanger de la farine, du sel, de l’écorce de cédrat et des œufs, faire un boudin qu’on coupera et qu’on fera cuire au four pendant un quart d’heure. Vous pouvez le napper de glaçage de sucre, de fruits confits ou même de caramel. |
Si la recette de l’alléluia est disponible pour tous, celle de la gloria reste secrète, tout comme son histoire. Il paraît que le gâteau est né dans la même pâtisserie qui a hébergé le soldat, mais certainement plus tard. Aucune source écrite n’en parle. Par contre le-bouche-à-oreille a très bien fonctionné pour glorifier son moelleux et son arôme de citron. Le gloria se présente comme un gâteau de Savoie mais rectangulaire et recouvert d’amandes effilées. D’où vient son nom ? Le pâtissier, pensait-il à son amoureuse, sa femme ou sa fille ? Est-ce que « gloria » a un rapport à la liturgie, comme « alléluia » ? Les deux mots chantent l’allégresse et remercient les cieux de nous avoir donné de telles gourmandises. Et contrairement à ce que chantaient les enfants, non, ceux qui n’en mangeront pas, ne pourront pas s’en passer !
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